Éditorial de Février 2018
Mes bonnes bêtes
Je m'étais souvent répété que j'allais en faire un bouquin. Et puis les jours passaient. J'y coinçais ceci ou cela, à la place du bouquin.
Lequel ne fut jamais commencé. Mais rien que l'idée de l'écrire me mettait du baume au cœur.
Par exemple je raconterais l'histoire du roi Yack. Yack 1er. Amour fusionnel et réciproque qui me
marqua pour la vie. Une part de mon cœur est resté accrochée à sa tombe, cachée sous le lierre rampant. Fier et puissant berger...il aurait défendu sa maîtresse jusqu'à ce que mort s'en suive.Mon cœur, plein de cicatrices, est comme une immense maison toute meublée de chambrettes dédiées à mes bêtes chéries. De chaque côté d'un grand couloir dont on ne voit même pas le bout.
Du temps de mes souris blanches, Yack 1er n'existait pas encore. Un couple de charmantes souris blanches m'avait été offert, et mon époux m'avait confectionné une super belle et grande cage pour abriter ces mignonnettes bestioles, censées être deux femelles ainsi que je l'avais décrété. Mais un mois plus tard une dizaine d'adorables petits souriceaux vinrent agrandir la famille.
Bon. Ben tant pis...ce n'était pas pour le petit peu qu'elles mangeaient que j'allais en faire tout un plat (!)
Et la cage était ma fois bien assez grande pour une douzaine de petites souris.
Hélas, un mois plus tard, rebelote pour dix souris de plus ! C'est là que je réalisai brutalement que mon élevage tel qu'il se présentait ne pouvait concilier le plaisir que j'y prenais, et la réalité toute bête. Et mes souris, condamnées à mort à bref délai, si libérées par mes soins au milieu de dame Nature, en attendant ma décision, croissaient en nombre, grâce à mon imprévoyance, d'une façon exponentielle... Si bien que je me résolu à les euthanasier à l'éther, n'en gardant que deux, au hasard, en souhaitant vivement qu'il s'agisse de deux mâles ou deux femelles. Ce geste de mort, par rapport à mes petites innocentes, me traumatise encore aujourd'hui.
Les deux souris étaient heureusement du même sexe. L'une mourut rapidement, d'une sorte de paralysie de l'arrière-train, avait-il semblé. A moins que ce ne fut de faim et de soif, à force de ne plus pouvoir bouger. Je reportai mes bons soins sur la survivante, à laquelle j'appris plein de belles choses : me grimper dans la poche, d'où elle sortait sa petite tête, à l'instar d'un bébé kangourou. Ou encore me grimper dans les cheveux, où elle gambadait allègrement.Je la conservais plus d'une année, et puis elle alla rejoindre sa compagne au paradis des petites innocentes.
Yackibelle remplaça Yack. J'avais choisi cette chienne berger très rustique afin de survivre à la perte du roi Yack. J'observai tous les bébés chiens derrière leur enclos, j'en observai un certain nombre : ils essayaient, les braves petits, en sautant le plus haut possible à ma rencontre, de me dire : »Tu vois, c'est moi le meilleur, c'est moi que tu vas choisir ! » Alors je leur tournais le dos, en pleurant de plus belle. Si bien que je choisis Yackibelle, la seule qui resta retirée dans un coin de l'enclos, l'air un peu triste. Son humeur était en accord avec mon cœur brisé. Si bien que je l'embrassai sur le museau, et l'emportais.
On ne devrait jamais acheter une bête sur un coup de cœur : ma bête resta triste, sa vie durant. C'était son tempérament profond. Ce fut la seule que j'osais faire courir à côté de mon VTT. Les seuls moments où elle se sentait vraiment heureuse. Elle mourut à 8 ans, des suites opératoires d'un cancer de la mamelle.
Les chiennes doivent avoir des petits, ou être castrées. Aucune alternative n'existe si on souhaite
les conserver en bonne santé.
Yacki, toutefois (Yackibelle II), vécu jusqu'à 14 ans, ce qui n'est pas mal pour un berger allemand.
Ce fut une gardienne remarquable. Bien que plus petite qu'un mâle, elle dissuadait totalement quiconque aurait eu l'idée de rentrer dans la maison sans ma permission. Elle fut castrée, après un cancer de la mamelle, dont elle se remis d'ailleurs totalement. Des années durant, elle fit des grossesses nerveuses qui me fendaient le cœur. Je ne pus me résoudre à lui faire « enlever sa féminité ». Jusqu'au jour où l'évidence me sauta à la figure : c'était la castration, le cancer, ou des bébés toutous. Pourquoi pas des bébés !? Al'époque mon mari, très malade, nécessitait toute ma vigilance et des soins constants.
Les grossesses nerveuses se manifestaient ainsi : Yacki grattait le sol en ciment de son local de nuit à s'en arracher les griffes ! Ses yeux brillaient d'une fièvre intense. Elle plaçait systématiquement ses jouets sur sa couche, et elle-même se couchait sur le sol nu, afin de laisser la place à ses « bébés ». Le lait s'écoulait de ses mamelles. Le vétérinaire, chaque fois, prescrivait le médicament adéquat, qui lui faisait passer le lait, et les dangereuses hormones s'accumulaient chaque fois un peu plus...
Elle vécu tout de même, heureuse, jusqu'à 14 ans.
Ensuite vint Yack II ...
mon petit caractériel ! J'étais tombée dans le ,panneau, une fois de plus :
J'avais acheté sur un coup de cœur. Yack II ne supportait pas les moindres frustrations. Bête superbe, il écoutait très mal, voire pas du tout, et profitait d'un certain défaut de la hanche pour « n'en faire qu'à sa tête ». Tout comme les mamans sont aux petits soins pour leur bébé le plus fragile, je me laissais avoir à tous les coups. Parfois, il venait, comme ça, l'air de rien, et plaçait sa tête sur mes genoux, un long moment. Je caressais doucement cette bonne grosse tête. Ce souvenir -là, que je conserve, entre mille autres, de ma bonne bête, morte trop tôt, c'est un ravissement, et, à quelque part, aussi, une douleur sourde.
Maintenant, il y a Nadal. Ce n'est pas « Yack 3 », c'est Nadal. Parfois, je l'appelle « Yack », par réflexe. Je n'arrête pas d'avoir peur de ce qui risque d'arriver à Nadal, qui essaye de faire dégringoler les stores de leur support, qui a renversé l'autre jour la bouteille de vinaigre laissée à sa portée dans un moment de distraction, et que j'enferme dans sa grande cage en le baladant avec moi quand je suis sur les 4 chemins.Seul endroit où rien ne risque de lui arriver, sauf accident...
Mais il y avait aussi ma bonne perruche. Je n'aurais jamais imaginé qu'un jour, un oiseau apprivoisé viendrait se placer sur mon épaule, m'accompagnerait partout, dans les chambres, se positionnant sur ma main, ou sur ma tête. Sortirait, l'été, par la fenêtre, pour rentrer, en frappant à cette fenêtre, le soir venu...Ma pêtite perruche ! Qui s'endormait le soir sur son perchoir, qu'elle avait choisi elle-même : il s'agissait d'un panneau de verre décoratif, et une poutre revêtue de miroirs, servant de support à ce panneau, permettait aussi que la perruche se voit ainsi, multipliée, presque, à l'infini. Elle devait alors se sentir moins seule. Ses escapades durèrent un été, une partie de l'automne, et deux jours au printemps suivant. Et puis je ne la revis plus jamais. Victime d'une buse ? D'un chasseur d'oiseaux ? Je ne la remplaçais pas. Une perruche, seule, n'est pas vraiment heureuse. Et je ne me sentais pas capable de placer deux perruches, en liberté, dans la maison : les petites crottes étaient assez nombreuses, finalement, et pas toutes plaçées en-bas du perchoir en face des miroirs.
Vous tous, mes bonnes bêtes, qui m'avez accompagnées sur le chemin de la vie, pendant tout le temps que la vôtre, trop courte, le permis, comme je vous ai aimées. Et comme j'éprouve le besoin, parfois, de vous évoquer, vous, si apaisantes, si pleines de vie, d'une intelligence aiguë, si aimantes
et si confiantes!
Simone
Commentaires
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- 1. Carole Le 01/02/2018
J'adore votre éditorial. Vous devriez vraiment écrire un livre.
J'espère que vous et Nadal allaient bien malgré ce temps.
Je suis passée cet après-midi faire un petit bonjour a la clinique. Il y avait un gros toutou de 80 kg...la race m'échappe...genre "matin de Naples" mais la tête plus fripée. Un gros molosse très gentil.
Je vous souhaite une agréable nuit et faites des câlins pour moi à Nadal. Ici toute la tribu dort.
Bien à vous.
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